13 février 2014 à 18:14
1985 : Eusebio au Pressigny
Et Eusebio débarqua aux Pressigny
Le 17 mai 1985, l’idole des Portugais foulait la pelouse de Selles-sur-Cher avec une sélection de compatriotes, face à une équipe du Centre. Séquence émotion.
La disparition d'Eusebio le 5 janvier dernier, victime d'un arrêt cardio-respiratoire à l'âge de 71 ans, a plongé l'ensemble du peuple portugais dans un deuil national. A Selles-sur-Cher, où la colonie lusitanienne a toujours été importante, il est forcément revenu en mémoire la visite de celui qu'on surnommait La Panthère noire. En effet, le 17 mai 1985, Eusebio et une sélection de compatriotes avaient rempli le stade des Pressigny pour un match de gala remporté (2-1) face à une sélection du Centre.
« J'avais été très flatté qu'on me sollicite pour jouer ce match, se remémore aujourd'hui Tonio Lorenzo, né espagnol à Vigo, tout près de la frontière du Portugal. Eusebio, il avait été quelque 20 ans plus tôt le meilleur joueur du monde avec Pelé. Honnêtement, j'ai longtemps cru à une plaisanterie ou à une supercherie. Jusqu'à ce que je me retrouve face à lui ».
" Il y avait un murmure dans le stade "
Des grands joueurs, Lorenzo, footballeur de la grande époque blésoise des années D2-D3 (1974-1984), en avait auparavant croisé quelques-uns : Platini, Giresse, Tigana, Carlos Bianchi, Henri Michel, mais aucun ne l'avait autant impressionné qu'Eusebio. « Il avait 43 ans, mais avait gardé une gestuelle et une vitesse d'exécution extraordinaires. Il réussissait des transversales hyper précises. C'est bien simple : à chaque fois qu'il touchait la balle, il y avait un murmure dans le stade… »
Pour Mario Silva qui avait tout juste 30 ans à l'époque, le souvenir est quasiment celui d'une humiliation. « Je jouais arrière droit et à un moment, rien que sur un contrôle orienté, il m'a mis dans le vent. Je me suis dit : " Mais comment est-ce possible à son âge qu'il fasse ça ? " Je suis resté quelques instants abasourdi. Et j'ai eu la rage (sic) ! »
Silva, originaire de Porto, n'avait pas fait d'Eusebio, joueur emblématique du Benfica, son idole. Mais il lui portait un grand respect : « Disons que je l'admirais lorsqu'il portait le maillot de notre sélection nationale. Et je lui trouvais aussi un énorme mérite : celui d'avoir réussi alors qu'il était noir de peau. »
Si pour Silva, le souvenir de la rencontre est un peu douloureux, celui de l'après-match ne l'est pas du tout. « Il s'est mélangé aux autres joueurs ; on a pu échanger quelques mots avec lui. Il était très humble, très gentil, pas du tout la grosse tête… » Qu'a ressenti le Montrichardais d'adoption à l'annonce de son décès ? « Je n'ai pas pleuré, mais j'ai eu mal. Eusebio, en plus d'être un grand joueur, c'était aussi un grand nom du Portugal. »
Ironie du sport, Mario Silva, ridiculisé par un plus ancien que lui, en a gardé un leitmotiv : celui de jouer au foot aussi longtemps que ses jambes le porteront. « Aujourd'hui, j'ai 59 ans et je joue toujours en 5e division départementale. Être encore sur un terrain, je considère que c'est une chance ». Comme celle d'avoir croisé une légende.
La sélection du Centre : Langer - Thébault, Fohran, P. Schoentgen, Papin - Lorenzo, Parizot, Guimont - Traoré, Sinson, Henriet. Remplaçants : Da Silva, D. Schoentgen, De Oliveira. Entraîneur : J.-G. Chevet.
le chiffre 435
C'est le nombre de buts qu'Eusebio aurait marqué durant toute sa carrière (1957-1979) lors de ses 442 matchs chez les professionnels. Son palmarès est également vertigineux : Ballon d'or en 1975 ; vainqueur de la coupe d'Europe des clubs champions en 1962 (trois fois finaliste en 1963, 1965, 1968), meilleur buteur (9 buts) de la Coupe du monde 1966 (3e avec le Portugal) ; 11 fois champion du Portugal ; 5 fois vainqueur de la coupe du Portugal. Eusébio a joué dans dix clubs : Loureço Marques (Mozambique, 1957-1960), Benfica (Portugal, 1960-1975), Rhode Island puis Boston (USA, 1975), Monterrey (Mexique, 1975-1976), Toronto (Canada, 1976), Beira-Mar (Portugal, 1976-1977), Las Vegas (USA, 1977), Uniao de Tomar (Portugal, 1977), New Jersey (USA, 1978-1979).
la phrase " Pour le buffet d'après-match, le charcutier nous avait fait un superbe terrain de foot avec des rillettes "
De Jean-Guy Chevet, entraîneur à l'époque de l'US Selles et de la sélection du Centre qui affrontait celle où évoluait Eusebio. Il ajoute. « On avait organisé ce match en quatre jours avec le président de l'époque Claude Salvert. On avait rempli le stade, puis après la salle des fêtes pour le repas. C'était une très bonne opération financière car si la sélection était repartie avec la recette, nous avions gardé tous les bénéfices de la buvette. Eusebio avait été adorable et très disponible. J'ai toujours gardé avec moi la photo où il porte dans ses bras mon fils, alors âgé de 5 ans. »
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